Les deux témoins

À cause de leurs superstitions de gaspilleurs une pièce de monnaie a percuté mon pare- brise, heureusement ma vitre n’est pas fêlée. J’ai demandé quel avantage de lancer l’argent sur un rond-point par dessus les voitures et on m’a répondu «c’est comme pour les étoiles filantes mais version payante».

J’ai vu les bâches municipales du chantier de fontaine, c’est là que j’ai compris la chance à saisir. Près de mon allume-cigare et du levier de vitesse j’ai empoigné la somme du péage et j’ai catapulté au mieux le bassin en travaux de mes quelques sous pour l’espoir.

Après avoir dévoilé mon vœux aux Chuglu, j’ai pu bourlinguer avec la bande, on a repéré un immeuble rempli d’activité à tous les étages alors en échassier on s’est grimpé sur les épaules, flanqués à la façade on a discutaillé en chaîne, en queue leu leu verticale, au commerçant du rez-de-chaussée jusqu’aux locataires près des volets, une tête par étage. Comme on a eu faim, on a chauffé le ballast des chemins de fer dans une marmite en inox, avec la suie liquide chaude les Chuglu ont voulu me baptiser. Fallait boire une lampée de jus de pierre pour continuer à suivre l’aventure … Dommage, j’aurais bien participé au voyage en rondin permutable, et accueilli les poissons-chat dans les poubelles publiques… mais j’ai voulu préserver mon foie malgré tous les honneurs de leur soupe aux cailloux.

Automobiliste

 

Je sais que les membres du collectif Chuglu se sont donné rendez-vous pour la première fois au sommet d’un château d’eau et que depuis les gouttières ils susurraient « chut, chut la vie, moins de bruit, c’est quand le sommeil ? »

Je sais que dans un commissariat ils se sont ligués, « tapez-là on forme une équipe maintenant, on nous appellera 100%pro, changeons-nous, voilà notre uniforme ».
Pour ma part j’ai rencontré les Chuglu sur l’avenue, ils étaient une vingtaine et ils bloquaient mon tramway pour déménager l’appartement d’un pote. Bien sûr je les ai aidés, après on a sympathisé, j’ai agrandi le rang, on a séché du linge sur un rond-point et on a chanté en créole Haïtien, on a même cligné des yeux super rapidement tout en haut des versants d’une montagne Suisse. À nous observer d’en bas les villageois nous prenaient pour des barbares nihilistes. C’est vrai que dans le collectif ils ont tendance à gueuler « aux armes », pour rien.

Au fur et à mesure des actions, Chuglu a trouvé plus accessible et plus moderne le travail de la gentillesse, comme dire bonjour à tout-va, ou de remplacer le petit point de la lettre i, ou d’attendre pour souhaiter du courage aux caissiers… Alors moi, je suis retourné conduire des tramways. Je me suis absenté du groupe un moment, ils ne m’en veulent pas, c’est l’avantage d’être avec les Chuglu. Y’a pas d’adhésion.

Conducteur du tramway Rtm

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